LECTURES VAGABONDES

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David Foenkinos : En cas de bonheur… le bonheur de lire.


Me voici repartie dans mes « explorations Foenkinossiennes » avec ce roman paru en 2005, à la suite du Potentiel érotique de ma femme : En cas de bonheur.

Les deux œuvres s'articulent d'ailleurs très bien puisque la première explore quelque peu les débuts d'un mariage heureux là où la seconde présente les difficultés d'un couple et d'un amour en proie à l'usure du temps.

Jean-Jacques et Claire sont mariés depuis huit ans et s'enfoncent de jour en jour un peu plus dans la routine de leur vie professionnelle et conjugale : ils ne font jamais plus l'amour, ne savent plus quoi se dire lorsqu'ils sont au restaurant, passent tous les dimanches après-midis à manger du gigot et à siroter des prunes chez René et Renée, les parents de Claire. Mais un jour, Jean-Jacques tombe sous le charme d'une jeune et jolie stagiaire – Sonia - et cède à la tentation de goûter à nouveau aux délices des nouvelles amours. Il trompe donc Claire qui, en proie au doute, engage un détective privé, Igor, pour le filer, lui et sa nouvelle conquête. Très vite, notre Claire, agacée par le nouveau bonheur un peu trop visible de son mari et par la vie routinière qu'il lui offre par ailleurs, abandonne tout pour s'envoler vers Berlin avec le timide Igor, dont le charme slave ne l'a jamais laissée tout à fait indifférente.

On retrouve, dans ce roman, l'alternance entre l'humour, la dérision et le sérieux, voire le tragique, déjà caractéristiques du Potentiel érotique de ma femme. Cette facilité à varier l'émotion par l'écriture fait, encore une fois, toute la saveur de ce moment de lecture. Par ailleurs, En cas de bonheur est sans doute mieux construit que le roman qui le précède. David Foenkinos a particulièrement soigné le chassé-croisé amoureux des personnages, leur mise en abyme, et les contrepoints dans leurs histoires. Les couples plus ou moins improbables se font et se défont dans une multitude de clins d'œil et de parallélismes. A l'intérieur de leurs histoires, on repérera d'autres correspondances : au voyage à Genève de Claire et de Jean-Jacques fait écho le voyage à Berlin de Claire et d'Igor, les séparations autour du fameux hamac familial se répondent entre elles, tous les personnages sont reliés les uns aux autres par le visionnage, à un moment ou à un autre, des Ailes du désir de Wim Wenders.

Par ailleurs, le roman est construit en boucle : il s'ouvre sur l'image d'un couple marié et uni par huit ans de fidélité et se ferme sur cette même image. Cependant, la note un peu niaise du bonheur final est atténuée par la suggestion de l'usure qui ne tardera pas à regagner Jean-Jacques et Claire… Bien plus, peut-être une nouvelle cassure, à l'instar de celle des parents de Claire, René et Renée (qui sont décidément tellement bien assortis qu'ils portent le même nom).

Ainsi, David Foenkinos nous livre ici un agréable marivaudage sur le thème du couple avec effectivement le jeu comme maître-mot de l'œuvre. L'auteur joue en effet avec lui-même en proposant de multiples clins d'œil plus ou moins ironiques à ses propres goûts (les voyages en Suisse, les Polonais, la Russie). Il joue également avec tous les clichés qu'il amoncelle presque par provocation, pour notre plus grand plaisir (les restaurants italiens, les dimanches après-midis chez les beaux-parents avec la petite prune finale, la bourgeoise qui tombe amoureuse du plombier…), sans oublier les clins d'œil et les correspondances avec le Potentiel érotique et ma femme (la dépression du personnage principal, les comédies familiales, professionnelles, les explorations de bibliothèque…)

Cependant, si j'avais un bémol à mettre quelque part sur la partition du bonheur de lire David Foenkinos, je dirais que parfois, les différents contrepoints et parallélismes manquent de subtilité et laissent au lecteur l'impression d'une mécanique assez prévisible, de procédés quelque peu artificiels utilisés pour faire tenir l'ensemble dans un cadre bien défini. Bref, parfois, la forme prime sur le fond…

Ceci dit, point d'artifice pour la chute de mon article : la scène du restaurant italien, je l'ai lue dans une pizzeria corse ! Reste à savoir si David Foenkinos l'a écrite dans une pizzeria suisse… et on pourra ainsi admirer la perfection du parallélisme entre l'auteur et le lecteur !   



17/08/2009
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