LECTURES VAGABONDES

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Henri Troyat : La lumière des justes (tome 1) : Les compagnons du coquelicot

 

 

                Quel plaisir de se replonger dans les grandes sagas d’Henri Troyat qui ont marqué mes débuts de grande lectrice passionnée ! Si je n’ai jamais lu La lumière des justes, je me souviens d’une adaptation télévisée de cette œuvre que j’ai dû voir dans les années 70 et qui m’avait plu, à l’époque. Alors pourquoi ne pas faire un bond en arrière et plonger dans cette grande saga franco-russe dont le premier tome intitulé Les compagnons du coquelicot a paru en 1959.

 

                Le barine Nicolas Ozareff débarque en France lors de la campagne de Paris qui a entériné la chute de l’empereur Napoléon 1er et l’arrivée au pouvoir de Louis XVIII. Pendant plusieurs mois, notre héros va vivre à Paris et découvrir la culture française, très différente de la culture russe. Il loge chez le comte de Lambrefoux, un monarchiste convaincu qui l’accueille chaleureusement. Nicolas tombe d’abord amoureux de la belle Delphine de Charlaz et entame avec elle une brève liaison qu’il interrompt lorsqu’il se rend compte qu’il est de plus en plus attiré par Sophie de Champlitte, veuve et fille de son logeur. La jeune fille est tout d’abord hostile au jeune homme : elle est républicaine, attachée aux valeurs de la révolution française et n’aime pas la mentalité russe qui cautionne le servage. Par ailleurs, les russes font partie de ceux qui ont permis le rétablissement de la vieille monarchie. Cependant, petit à petit, Sophie tombe sous le charme de Nicolas qui doit néanmoins rejoindre la Russie. Tout semble terminé entre les jeunes gens qui se sont seulement avoué leur amour impossible. En 1815, Napoléon, revenu au pouvoir pendant 100 jours, est à nouveau balayé et les russes sont à nouveau dans Paris. Nicolas revoit Sophie qui est quelque peu tracassée par ses opinions politiques et son appartenance aux compagnons du coquelicot, un groupe d’agitateurs républicains qui signent des articles dans une revue interdite. Malgré tout, Nicolas demande la jeune fille en mariage ; elle accepte. Si monsieur et madame de Lambrefoux sont quelque peu réticents devant ce projet, Michel Borissovitch, le père de Nicolas, s’oppose farouchement à cette union. Par peur de perdre sa fiancée, Nicolas tait le refus de son père et épouse Sophie qui, lorsqu’elle débarque en Russie au bras de son mari, croit qu’elle sera bien accueillie. Bien évidemment, ce n’est pas le cas et le couple décide de s’installer à Saint-Pétersbourg, loin d’un père hostile. A suivre !

 

                Avec La lumières de justes, on retrouve le plaisir d’une vraie grande et belle saga comme Henri Troyat sait si bien les imaginer et les écrire. Avec les compagnons du coquelicot, nous sommes plongés dans une France divisée et assiégée par les peuples d’une coalition antinapoléonienne dont la Russie fait partie. C’est l’occasion pour Henri Troyat de faire se rencontrer et s’affronter deux cultures qu’il chérit particulièrement : la française et la russe.

                La culture française est incarnée par différents personnages aux opinions politiques différentes. Mais les valeurs qui sont mises en avant sont celles qui viennent de la révolution française et que Sophie et les compagnons du coquelicot défendent. Ainsi émerge l’image d’une France attachée aux débats politiques, aux partis divers et parfois virulents, pays où la liberté d’expression et la méfiance vis-à-vis de la religion sont importantes.

                La culture russe est incarnée par Nicolas Ozareff, principalement. Le jeune homme est attaché à la toute puissance du tsar Alexandre 1er et à la religion orthodoxe. La liberté est une valeur qu’il découvre en France et qui pose problème à son père, Michel Borissovitch. Dans un pays où le servage existe depuis la nuit des temps, on n’aime pas voir débarquer une jeune élégante à la tête farcie d’idéaux politiques.

                Quant aux personnages, ils sont jeunes, beaux et attachants. Passionnés, amoureux, ils ont l’énergie romantique chevillée au corps. Ainsi, Nicolas et Sophie se laissent-t-ils déborder par leurs sentiments plus forts que tout. Parce que la passion les emporte, ils dépassent la culture de leur pays respectifs pour se retrouver sur le terrain de l’amour et de la tolérance.

                Certes, l’intrigue n’est guère originale ; elle est celle de toute saga qui se respecte. Un homme et une femme s’aiment passionnément mais leur amour rencontre des difficultés majeures qui laissent penser qu’il est impossible.  Enfin, les obstacles sont balayés devant la force des sentiments car dans les sagas, l’amour triomphe toujours.

                Cependant, le fond historique est intéressant et assez scrupuleusement restitué. Nous plongeons au cœur d’une armée russe qui découvre Paris et ses embarras ; les événements historiques qui jalonnent les années 1814-1815 forment un arrière-plan plutôt bien dessiné et suffisamment consistant pour qu’on ne reproche pas à Troyat ce qu’on peut reprocher à de nombreuses sagas : le prétexte historique grossièrement restitué, interchangeable et mièvre.

                Ainsi, on a plutôt hâte de lire la suite…. même si d’autres lectures sont prévues avant ce prochain plongeon dans la Russie du XIXème siècle.



04/06/2016
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