LECTURES VAGABONDES

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Jean d'Ormesson : une fête en larmes / surtout des larmes

Réflexion menée lors de la parution d'Une fête en larmes en 2005



L'un des événements de cette rentrée littéraire, avec la sortie du dernier Houellebecq (va falloir aussi se sacrifier pour celui-là !), c'est la parution d'une fête en larmes, de Jean D'Ormesson. Mais peut-être faudrait-il plutôt parler de non-événement ?

En effet, depuis plusieurs années déjà, Jean D'Ormesson ne cesse de tirer sa révérence et d'écrire son testament spirituel… Du côté de chez Jean, Au revoir et merci, mais encore, C'était bien, paru en 2003, dont l'un des chapitres, d'ailleurs, s'intitule « une fête en larmes ». Il semblerait donc bien que ce brave Jean D'Ormesson finisse par radoter !

Personnellement, je m'arrêterai à C'était bien : c'est suffisant, selon moi…dans les deux sens du terme.

Suffisant, en effet, pour cerner la suffisance d'un écrivain de salon, certes habile dans le maniement du paradoxe, et c'est bien là ce qui fait sa force. Car Jean D'Ormesson ne cesse de répéter qu'il ne sait rien, qu'il est, je cite, un « brillant imbécile », sans cesser jamais de débiter des centaines de noms d'illustres prédécesseurs dont il se réclame l'héritier, des milliers de citations de tous bords, des millions de références historico-scientifico-philosophico-soporifiques. Ainsi, il pare à toute attaque concernant cet étalage scolaire et pédant d'un savoir certes, très hétéroclite et solide. Sans doute, Monsieur D'Ormesson a-t-il gardé de son passage sur les bancs du lycée Louis Le Grand un certain coup de plume qui lui permet de masquer l'inanité de sa pensée philosophique : ainsi, on lui saura gré de mettre joliment en forme les interrogations métaphysiques du plus commun des mortels, à savoir, qu'on meurt tous un jour, qu'on est bien peu de chose dans l'univers, et que l'univers est, lui aussi, bien peu de chose, puisqu'il est, lui aussi, condamné à mort… à très long terme.  Et de s'interroger alors : quel sens donner à tout ça ? C'est, en gros, la ligne directrice de C'était bien, un livre qui permet de réviser le programme de philo niveau terminale (l'histoire, la science, la mort, le hasard et la nécessité, etc…). Certes, Jean D'Ormesson nous livre là une dissertation qui ravirait les correcteurs de l'épreuve de philosophie au bac… mais publie-t-on les très brillantes dissertations de philosophie ?

Finalement, mieux vaut écouter la chanson de Jean Gabin : « je sais que je ne sais rien » : on gagne du temps pour un même contenu et une forme tout aussi ronflante. Car tout comme Jean Gabin, Monsieur D'Ormesson se pose là en vieux sage, détaché de la vie, mais néanmoins reconnaissant, en conseiller, en prophète chenu : il va même jusqu'à bénir l'univers, comme si l'univers avait besoin de la bénédiction de Monsieur D'Ormesson ! Et de terminer par cet envoi grandiloquent, proféré d'une voix quasi sépulcrale :

 

« Vous glissez le livre dans votre poche

De temps en temps, vous le feuilletez,

Et puis, vous l'oubliez. »

 

Le feuilleter de temps en temps ? Un peu présomptueux, ce brave Jeannot… Personnellement, je garderai en mémoire la dernière phrase… et je m'épargnerai le supposé radotage pontifiant d'une fête en larmes.    




04/01/2009
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